Préface de Paul Ariès

arton289Notre société capitaliste et productiviste du « toujours plus » est en crise… Nous ne devons pas cependant attendre que ce système s’écroule de lui-même et que de ses ruines encore fumantes surgisse spontanément un monde meilleur. J’appartiens à ceux qui préfèrent chanter au présent plutôt qu’à de lointains lendemains qui chantent. C’est dès maintenant que nous devons commencer à trouver des issues. Nous avons une bonne nouvelle à apporter à l’humanité : la société des humains est déjà assez riche pour permettre à plus de sept milliards d’humains de bien vivre…
Nous n’avons donc pas à courber l’échine devant les politiques de récession sociale mais nous devons, bien au contraire, affirmer qu’être fidèles aux combats émancipateurs de nos anciens, c’est être aujourd’hui encore plus exigeants, c’est donc imposer un nouveau pacte de droits sociaux qui ne soit pas en retrait, c’est imaginer un nouveau pacte qui ne nous conduise pas à défendre un système qui nous tue, mais qui nous permette de commencer à changer véritablement de société.

Nous avons un débat entre nous sur la bonne façon de nommer ce nouveau pacte : revenu social, Dotation Inconditionnelle d’Autonomie, revenu universel ou de citoyenneté, salaire socialisé, dividende social, peu importe finalement le terme. L’essentiel c’est que les adeptes d’un revenu garanti inconditionnel se disent tous convaincus qu’il ne s’agit pas d’être moins disant socialement mais mieux disant…
L’essentiel c’est que nous soyons tous convaincus que cette Dotation Inconditionnelle d’Autonomie est un composant essentiel de ce nouveau pacte social qui permettra d’avancer vers plus d’autonomie et d’en finir, au plus vite, avec la centralité du travail dans nos vies.
Les débats sur les formes que prendra ce revenu social doivent se poursuivre. Nous avons tout à gagner à ne pas cultiver ce qui nous différencie, mais à chercher une convergence qui tienne compte de notre histoire sociale, politique et culturelle. Nous devons en finir avec plus de vingt ans d’échec du combat en faveur de ce revenu social, nous ne devons pas davantage être dupes lorsque nos adversaires comme Alain Madelin, Christine Boutin ou Dominique de Villepin parlent de « dividende social ». Ce qui nous oppose à la droite ce n’est pas seulement le montant du revenu garanti, ce n’est pas uniquement son caractère universel ou pas, inconditionnel ou pas, c’est la place qu’occupe ce revenu garanti universel et inconditionnel comme instrument de sortie du capitalisme et du productivisme. Pour le dire autrement : la Dotation Inconditionnelle d’Autonomie n’est en rien un simple revenu de survie ! Il est lié à la notion de don, de gratuité, donc à la construction de « communs »…

J’ai toujours dit ma préférence pour une Dotation Inconditionnelle d’Autonomie qui prendrait plusieurs formes : une partie sous forme de monnaie nationale (en euros), une autre partie importante sous forme de monnaie locale à inventer (afin de faciliter notamment la relocalisation de biens socialement et écologiquement responsables) et une partie, essentielle à mes yeux, distribuée sous forme de droits d’accès aux biens communs (gratuité de l’eau vitale, des transports en commun, bouclier énergétique, etc.). Je suis convaincu que notre combat pour une Dotation Inconditionnelle d’Autonomie doit prendre avant tout la forme de la défense et de l’extension de la sphère de la gratuité (libre accès à certains biens et services).

Ce Manifeste pour une Dotation Inconditionnelle d’Autonomie (DIA) ouvre un grand chantier, celui d’une décroissance économique qui profite d’abord aux plus pauvres, celui d’une décroissance qui, se refusant à réclamer plus d’austérité encore à « Hollandréou », cherche à inventer ce que pourrait être une politique du Buen vivir à la française !

Paul Ariès
Directeur de La vie est à nous ! / Le sarkophage.
Rédacteur en chef de la revue les Z’indigné-e-s.